Marie Colmont et Les Castor Poche

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Marie Colmont et

Les Castor Poche

 

voici quelques extraits d'un article paru dans le Bulletin des Bibliothèques de France le 14 novembre 2016 et écrit par Claire Delbard.

 

Son titre : QUE SONT LES CASTOR POCHE DEVENUS ?

En quoi les archives d'éditeurs sont-elles une aide pour comprendre et analyser les politiques éditoriales?

 

         L’histoire des collections jeunesse, de leur genèse, de leur développement et de leur évolution est un sujet de recherche universitaire relativement récent, qui intéresse les chercheurs mais aussi les citoyens, qui cherchent à appréhender par ce biais l’évolution des politiques éditoriales, reflet de nos sociétés contemporaines.

             C’est ce qui avait été le point de départ de notre travail de recherche sur la collection Castor Poche à la fin des années 90. Le travail de thèse dirigé par Jean-Yves Mollier avait fait l’objet d’une publication en début 2007.

        Il nous a semblé pertinent d’y revenir et d’observer, avec le recul, ce que sont aujourd’hui les Castor Poche devenus. C’est l’objet de cet article….

 

           Pour essayer de comprendre et d’analyser la disparition d’auteurs du catalogue, nous pouvons sur ce point émettre plusieurs hypothèses.

             Certains titres, au fil du temps, ont sans doute un peu vieilli, et les goûts des enfants ont sans doute évolué, mais se pose alors la question de l’universalité des titres choisis qui était un des préceptes fort de la collection.

          En effet, une des valeurs fortes du montage de la collection était l’universalité du propos, qui suppose donc une longévité dans la mise à disposition du titre pour les enfants. C’est ce que l’on appelle en terme marketing le passage de la nouveauté au fonds, parfois au best-seller quand l’éditeur est chanceux. On prend acte que les goûts des enfants ont changé et que certains titres ne sont plus « adaptés » au lectorat jeunesse, mais le côté humaniste et universel qui prévalait dans le choix des manuscrits au début de la collection a permis d’éviter en grande partie cet écueil, au moins durant la première décennie.

 

          Nous aimerions revenir sur certains auteurs qui ont disparu du catalogue et dont la disparition pose question au regard de l’identité même de l’Atelier du Père Castor.

Les enfants aux yeux éteints de Lida Durdikova ont disparu du catalogue. Si l’on sait que Lida était l’épouse du fondateur des éditions Paul Faucher et que le titre en question relate l’expérience de

:

« Claire, 18 ans, (qui)  apprend que six enfants aveugles vont devoir rester à l'institut pendant les vacances. Elle propose de les accueillir dans une petite maison à la montagne. Jour après jour, au long des jeux et des promenades, Claire accompagne les enfants dans leurs découvertes du monde...

 

             On peut se demander pourquoi ce titre-phare qui prône les valeurs initiales affichées de la collection que sont l’amitié entre les peuples, l’accueil de la différence, la découverte du monde dans la bienveillance n’est plus édité.

            Si le volume annuel des titres vendus est le seul indicateur pour exclure un titre du catalogue dans une logique économique, il y a fort à parier que ce ne seront à terme que les séries (qui se vendent le mieux) qui resteront ou se développeront dans le catalogue.

             Or, avec la disparition de cet auteur de cette collection, c’est une part des principes initiaux qui assurait l’identité de la collection qui disparaît. On aurait pu souhaiter que la mise en avant des auteurs maison, au sens le plus fort du terme ici, aurait été mieux assurée et permis d’afficher une continuité, si chère à François Faucher. Il n’en est rien.

           François Faucher a choisi, pour essayer d’enrayer ce processus de désherbage d’auteurs et de titres, de constituer une association, Les Amis du Père Castor, qui accompagnée d’un comité d’éthique assure la réédition de certains titres des éditions de l’Atelier du Père Castor qui ne sont plus au catalogue de Flammarion.

 

           Nous aimerions souligner la difficulté que rencontre un éditeur pour assurer la disponibilité de l’ensemble des titres de sa collection quand les courbes de vente des titres sont analysées à la loupe par les contrôleurs de gestion des services financiers.

            La vocation et le métier d’éditeur tels qu’ils se sont pratiqués jusqu’aux années quatre-vingt-dix se heurtent de plein fouet, et c’est encore plus vrai aujourd’hui qu’hier, aux sirènes de l’économie de marché et de la rentabilité.

            Cette logique qui va à l’encontre de la qualité est accélérée par les rachats et regroupements successifs des maisons d’édition et par la rotation de plus en plus rapide des titres dans les librairies.

                   Un titre qui ne connaît pas de succès immédiat aura peu de chance d’être conservé dans le fonds, alors même que c’est le fonds qui constitue la durabilité et la qualité d’une collection.

                 Des études croisées des fonds de librairie et d’analyse des retours ont montré que la durée de vie d’un livre était de plus en plus courte en magasin, et la disponibilité chez l’éditeur souvent réductible à moins de deux ans. Ce processus déjà en marche à la fin des années quatre-vingt-dix s’est amplifié. Il n’est à ce jour au demeurant pas possible de mesurer encore exactement l’incidence du rachat par Madrigall.

 

                 Dans la liste des auteurs disparus du catalogue Castor poche, quelques disparitions emblématiques sont à souligner qui ont pourtant assuré la notoriété de la collection :

     En 1981, L’Autre d’Andrée Chedid paraît et vient enrichir le choix des premiers titres  parus l’année précédente, assurant ainsi une belle visibilité à la collection naissante ou encore dans sa phase d’implantation. Mais le titre n’est aujourd’hui, en 2015, plus au catalogue. Il est en revanche toujours présent chez Flammarion au format poche dans la collection Librio et on le retrouve dans le catalogue d’hiver 2015 de France Loisirs.

On peut ici supposer que c’est la logique commerciale qui a dominé la décision. Assurer plus de ventes dans un format à destination du tout public (adultes et enfants) ou via la VPC (vente par correspondance, donc avec droits différents dans leur montant), mais au détriment d’une collection déjà installée. Et il en est de même pour les autres titres du même auteur,  tous disparus du catalogue si l’on excepte L’Enfant multiple.

 

           Disparition également de Marie Colmont de cette collection que l’on peut aussi déplorer car pour la même raison que celle expliquée plus haut (les textes célèbres de Marie Colmont, sont eux restés au catalogue des albums, comme Marlaguette ou Michka) est aussi un gage d’identité de la collection, inscrite dans une politique d’auteurs maison.

 

        (L’auteure de l’article cite ensuite d’autres auteurs qui ont disparu du catalogue.)

Castor poche y a perdu de son crédit auprès des libraires, des prescripteurs, et aussi une partie de sa réputation de qualité.

Castor poche occupait en 1992 la deuxième place des collections de poche en nombre de volumes vendus (1 700 000 de ventes nettes.

 Dans le travail effectué par Bertrand Ferrier, elle n’entre même plus dans la liste des dix premières.

 

        On comprend dès lors mieux le choix que François Faucher a pu effectuer pérenniser la mémoire de la maison d’édition, par le biais d’une association,  et d’en assurer la continuité patrimoniale.

 

             Quelles préconisations pour garder vivant le patrimoine d’une collection et de ses archives?

             Relater l’initiative de François Faucher, depuis 1996, prend ici tout son sens. L’association des Amis du Père Castor, sise à Meuzac (Limousin), réédite en effet, sous forme de fac-similés des textes précieux, qui ne sont plus au catalogue de la maison Flammarion, assurant ainsi la pérennité d’un fonds patrimonial que nous ne pourrions sans cela plus avoir à disposition. Est disponible dans la collection des fac-similés un choix de titres épuisés que l’on peut consulter sur leur site. Nous trouvons également des textes fondateurs comme « la mission éducative des Albums du père Castor » ou l’ensemble des « préfaces » des albums de l’époque de Paul Faucher et bien d’autres ressources encore. Le catalogue est également consultable sur leur site, récemment rénové

 

 

       L’intégralité de l’article est disponible sur le site : Bulletin des bibliothèques de France, archives des contributions, novembre 2016.

 

http://bbf.enssib.fr/contributions/archives

 

     

Voici quelques couvertures des livres de Marie Colmont publiés dans la collection Castor Poche :

 

Et je découvre que je n’ai jamais évoqué le livre « 25 contes des peuples indiens »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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